Les salaires des patrons repartent à la hausse et causent la polémique dans certains cas. Le marché du recrutement est en pleine surchauffe.
Une augmentation de 569% pour le patron d'Apple, +65% pour celui de Goldman Sachs, -8% pour celui de Bank of America: le revenu médian des directeurs généraux des 100 plus grosses entreprises américaines a augmenté de 31% en 2021, selon une étude du cabinet Equilar diffusée lundi.
Entre les salaires, les primes et les stock-options, leurs revenus médians avaient reculé de 2% en 2020, année où avait éclaté la pandémie, rappelle le cabinet. En 2021, ces 100 patrons ont gagné 20 millions de dollars en moyenne, le plus cher payé étant le directeur général d'Intel Patrick Gelsinger (178 millions de dollars), détaille Equilar. Il est suivi de Tim Cook d'Apple (99 millions), de Hock Tan de Broadcom (61 millions) et de Satya Nadella de Microsoft (50 millions).
Cette envolée des salaires n'est pas une réalité qu'aux États-Unis. En Europe également, certaines rémunérations défraient la chronique. Celle de Carlos Tavares publiée en fin de semaine dernière a même fait réagir les candidats aux élections présidentielles en France. Emmanuel Macron s'est déclaré choqué par les quelque 19 millions d'euros de rémunération versés au patron de Stellantis. Même réaction du côté de sa rivale Marine Le Pen.
Mais le salaire global de Tavares n'est encore qu'une paille par rapport à celui du CEO d'Universal Music Group. Lucian Grainge a touché près de 274 millions d'euros en 2021, du fait notamment des primes versées à l'occasion de l'entrée en bourse de la filiale de Vivendi l'an dernier.
Effet de rattrapage
Dérive, flambée des prix ou simple rattrapage? "Il ne fait pas oublier qu'en 2020, beaucoup de patrons on fait une croix sur leur rémunération variable notamment, tout comme les actionnaires avaient renoncé à leur dividende à cause de la crise sanitaire", rappelle Sandra Gobert, Executive Director de Guberna. Entretemps, la reprise économique à la faveur de l'extinction progressive du coronavirus est passée par là et a relancé la machine des rémunérations.
"Mais les politiques de rémunération n'ont pas changé depuis", affirme encore la directrice de l'institut des administrateurs. "Et tant qu'elle reste cohérente par rapport à la rémunération globale de l'entreprise et qu'elle est en ligne avec une politique de création de valeur durable pour l'entreprise, il n'y a rien à y redire du point de vue de la gouvernance des entreprises."
On assiste donc davantage à un effet de rattrapage plutôt qu'à une flambée des prix, hormis quelques cas exceptionnels liés à des performances ou des boni particuliers. En Belgique, la rémunération moyenne les patrons du Bel20 s'élève à 2,74 millions d’euros, ce qui représente une hausse de 3,7% par rapport à 2020, si l'on fait abstraction du salaire global de Michel Doukeris, le nouveau patron d'ABInbev qui tire la moyenne vers le haut.
Surchauffe du recrutement
Mais il n'empêche, le marché du recrutement est clairement en phase de surchauffe actuellement. "Bon nombre de missions de recrutement pour des fonctions exécutives avaient été mises au frigo en 2020 et 21021. Elles en sortent aujourd'hui", reconnait un recruteur spécialisé dans l'IT. "Et par ailleurs, dans la foulée de cette crise sanitaire, beaucoup de gens se sont remis en cause, par rapport leur employeur ou par rapport à leur vie professionnelle. Cela crée un appel d'air sur le marché et des vides à combler. Le marché n'avait plus connu une telle situation depuis la fièvre du 'dot.com'."
Résultat, les cabinets de recrutement font la chasse aux meilleurs éléments. "Certains ne répondent même plus à nos appels et ceux qui le font ont plusieurs propositions sur la table", témoigne-t-il. Du coup, les entreprises sont prêtes à délier les cordons de la bourse pour garder leurs cerveaux. Et ce n'est pas seulement vrai pour les grands patrons, mais aussi pour les métiers en pénurie.
- Les salaires des grands patrons semblent repartir à la hausse.
- Il s'agit surtout d'un effet de rattrapage après les "privations" de 2020.
- Mais les entreprises sont prêtes à payer plus les managers les plus demandés, particulièrement dans les métiers en pénurie.